les wichis

victimes oubliés du soja

Dans le Nord de l’Argentine, s'étend l'impénétrable forêt du Gran Chaco, deuxième plus grand espace boisé du continent après l’Amazonie. Elle abrite plusieurs communautés aborigènes dont l’une des plus grandes, les Wichi. En 1996 le gouvernement autorise l’introduction du soja génétiquement modifié et commence la destruction d’un quart du Gran Chaco et de l'environnement naturel du peuple Wichi. L’impact humanitaire et environnemental causé par 20 ans de déforestation pour une monoculture intensive du soja a pratiquement détruit le mode de vie des Wichis. 

20 ans de déforestation 

En 20 ans de déforestation, l'environnement de plus de 40 000 Wichis et d’autres minorités aborigènes s’est complètement métamorphosé.  Le gouvernement à vendu leurs terres à des compagnies spécialisées dans la monoculture du soja tout en chassant les wichis dans des zones définies. Les Wichis ont un mode de vie  profondément lié à la nature. En tant que chasseurs cueilleurs, la forêt à toujours été source de nourriture, de plantes médicinales, et de bois pour le village. De nos jours une grande partie de la vie animale a disparu, beaucoup de plantes sont devenues introuvables et il est devenu illégal de pénétrer sur beaucoup de territoires aujourd’hui privés. Ainsi les Wichis ont complètement perdu leur liberté, leur autosuffisance et donc leur indépendance. Ne pouvant plus chasser, ils dépendent actuellement d’aides sociales du gouvernement et de nourriture distribuée au compte goutte par les municipalités souvent à des fins politique. Leurs conditions de vie se sont profondément dégradées entre le contact agressif de la société moderne et l’introduction d’une nourriture plus grasse. Mais l’impact le plus violent sur la santé réside dans l’utilisation des pesticides nécessaires pour la production de soja comme le Roundup, produit par la compagnie américaine Monsanto. Le Roundup est déversé par avion sur les monocultures, touchant toutes les communautés environnantes.


Même si certains Wichis tentent de trouver du travail dans les villes voisines, une discrimination très forte s’est installée envers les communautés natives. La méconnaissance culturelle  et une très mauvaise politique d’intégration ont déconnecté les argentins du peuple Wichi. Dans la ville de Tartagal, les Wichis apparaissent comme une population pauvre et ignoré par les citadins. Certaines femmes viennent vendre leurs créations artisanales mais à des prix bien trop bas. Pour seulement 1 euro, elles vendent leurs sacs et objets faits à la main et qui ont demandé plusieurs jours de travail. La déforestation ayant presque fait disparaître la plante utilisée pour l’artisanat Wichi, les femmes sont obligées d’acheter la matière première pour travailler, rendant la commercialisation encore plus précaire. Certains hommes plus agés des villages vont parfois chasser ou chercher des plantes nécessaires mais doivent franchir des territoires interdits et privatisés par de nouveaux propriétaires, ce qui provoque parfois des altercations. Même les enfants doivent marcher des kilomètres en franchissant des barbelés et terres interdites pour aller à l’école. Les enseignants argentins eux, sont très souvent absents, la pluie rendant l'accès impossible en voiture. Avec une éducation défavorable pour les Wichi, la lutte contre le gouvernement et la déforestation du Gran Chaco reste très difficile, seule une minorité d’ONG et d’argentins essaient de les aider. 

L’Europe a importé 27,8 millions de tonnes de soja d’Amérique latine en 2016.

Par son développement de la monoculture intensive, l’Argentine s’est rendue dépendante du soja qui représente près de 31% de l’exportation du pays. Le soja se dirige ensuite vers la Russie, le Moyen Orient, l'Australie, l’Asie mais c’est en Europe que cette exportation est la plus forte avec 9.8m de tonnes soit un tiers de l’importation en Europe (27.8m). Au sein de l’UE, la France est la cinquième destination en importance pour les importations de soja latino-américain, après les Pays-Bas et l’Espagne . Une fois arrivé en France, ce soja est acheté, soit par des professionnels de l’alimentation animale soit directement par les éleveurs pour nourrir le bétail destiné à la production de viande ou de produits laitiers. Ces denrées sont ensuite vendues aux supermarchés et aux restaurants et enfin achetées par les consommateurs.


Le futur de la forêt et des Wichi reste très incertain, les produits chimiques déversés pendant 20 ans ont endommagé les sols et les nouvelles générations Wichi ont, pour beaucoup, perdu leurs traditions et parfois même leur langue.